Le YCPL a passé le cap Horn

 

Ce sont 7 vaillants membres du club, (J.P. Gonon et Chantal, P. Gayout et Fraisie, G. van Cutsem et Clarisse, et F

Abords du Horn

Abords du Horn

Meynckens,) qui se sont élancés le 7 février d’Ushaia sur un Baltic 51 « Venus » pour affronter le mythique cap Horn et se balader dans les canaux patagoniens.

Toute la croisière se déroulant au Chili, il a fallu effectuer des formalités frontalières un peu longues à Ushaia pour quitter l’Argentine.  C’est une ville-port étonnante de 87.000 habitants car objet d’une franchise d’impôts, située dans un écrin au bord du canal de Beagle environné de monts assez hauts et enneigés, à l’architecture improbable et colorée, un affreux casino défigurant sa côte.

La balade vers le Sud dans le canal Beagle passe obligatoirement par Puerto Williams au Chili pour accomplir les mêmes formalités toujours aussi fastidieuses. Ce port est réellement la ville (2.300 habitants) la plus australe du monde, contrairement à la réputation que s’est usurpée Ushaia de « Ville du bout du monde ». C’est un bourg qui s’étend le long du canal sur la côté chilienne. Les maisons en sont tout aussi curieuses, un peu délabrées, très colorées mais sans volets ni isolation, avec d’imposants stocks de bois de chauffage dans les jardins. Le tout assez pauvre et mal entretenu.

Le « port » est juste un bateau échoué qui sert de base pour les sanitaires et le restaurant-bar le plus austral du monde, le Micalvi, muni d’un ordinateur accessible à tous, tapissé de fanions et drapeaux des cap-horniers (celui du YCPL y est désormais agrafé au plafond) et siège de soirées bien arrosées pour une faune atypique de tours-du-mondistes ou soixante-huitards attardés !!  Certains de l’équipage (de sexe masculin !) ont profité jusqu’à une heure tardive d’une de ces fêtes nocturnes agrémentée d’une danse typique et très suggestive, la Bachata.

Une fenêtre météo favorable a amené, après conciliabule avec l’équipage, notre capitaine Christophe, charmant et compétent garçon d’une trentaine d’année, à tenter le passage du fameux cap dans les deux jours.

Départ donc pour Puerto Toro, base plus au Sud où séjournent 80 militaires et 2 civils et où nous avons accosté à un ponton destiné aux pêcheurs de grosses araignées (délicieuses) en saison. Petit trou perdu où n’arrive aucune route, vraiment le dernier hameau du bout du monde.

Le lendemain, départ à 5 heures pour passer le cap avant la tempête qui s’annonçait. Navigation à la voile à 8, 9 nds dans la baie de Nassau ou se rencontrent de petits manchots australs, des quantités de cormorans au ventre blanc volant en escadrilles ou agglutinés par centaines sur des îlots et de superbes et d’élégants albatros planant au dessus des flots. Accompagnés également par des dauphins assez petits et au ventre blanc. Il fait très beau et les paysages sont grandioses.  Mais en Patagonie, le temps change très rapidement et on peut passer d’une minute à l’autre du soleil à la grêle.

Notre capitaine, très avisé, décide de contourner l’île d’Horn d’Ouest en Est, c’est à dire du Pacifique à l’Atlantique. Bien lui prend car un voilier qui faisait route derrière nous, ayant choisi l’option inverse, a dû rebrousser chemin ne pouvant affronter le vent fort qui s’était levé et la houle contre. C’est à 16h. 30 qu’un équipage ému, hilare et exubérant a franchi les abords de ce gros rocher pyramidal, objet de tous les fantasmes, sous la pluie et avec un vent forcissant.

Après ce moment historique, Venus est allé mouiller et passer la nuit dans la caleta Martial, Débarquement sur une plage de sable doré où la chienne du bord, Fanette, a pu se défouler en de nombreuses allées et venues.

C’est ensuite le retour vers le Nord par grand vent, bourrasques, vagues, pluie, grêle.  Le capitaine demande qu’on porte les gilets et qu’on s’attache. Certains, les moins utiles sur le pont, se réfugient à l’intérieur bien chauffé !

Mouillage pour la nuit à l’île Lennox, où un voilier revenu de l’Antartique est venu mouiller à nos côtés, compagnie rare dans ces contrées. L’équipage au complet débarque sur une grève de sable noir, envahie de nasses de pêcheurs. Après avoir salué le militaire qui passe en famille un an dans ce lieu perdu et, fait exceptionnel, nous reçoit dans sa confortable maison, nous partons faire une belle balade sur un sol très spongieux pour visiter cette île totalement sauvage et préservée avec des vues splendides sur les bras de mer et les îles alentour et une végétation où dominent les ocres jaunes et les différentes nuances de verts.

« L’armada » chilienne étant très procédurière, Christophe doit se signaler à tous les points de passage sensibles aux militaires installés dans ces coins perdus mais très surveillés. Il existe d’ailleurs peu de mouillages autorisés.  C’est pourquoi également, il a fallu repasser par Puerto Williams pour qu’il retourne à l’office militaire afin de faire des démarches qui nous permettent de continuer notre route vers le Nord par les canaux.  C’est là que le vent s’annonçant à plus de 25 nds, le port interdit toute sortie, et donc nous avons dû attendre le surlendemain pour poursuivre notre route.

Cette route dans les canaux vers le Nord, qui à la voile qui au moteur pour cause de vent dans le nez, nous permet de rencontrer 2 baleines, dont il n’est possible d’immortaliser que le souffle ou la queue en plongeon, et de profiter de vues magnifiques sur les deux rives montagneuses, aux sommets enneigés.

Le vent et le courant très fort à contre décident Christophe à faire escale à la caleta Eugenio, paradisiaque et étale comme un lac.

Ces mouillages sont inoubliables dans des caletas sauvages où la nature vierge est tellement préservée qu’on ne rencontre aucune pollution, aucun déchet, où l’eau est transparente, où les oiseaux se perchent sur les amarres sans crainte tel ce martin-pêcheur coloré mais aussi des hérons, des busards et toujours les cormorans traçant comme des flèches vers on ne sait quelle but.

Un contact avec un voilier, celui qui nous suit toujours (de loin), indique que les conditions de navigation se sont améliorées, on décide de repartir.

Mouillage dans la caleta Olla vers 22h.30, et amarrage comme d’habitude : 90 m. de chaîne plus 2 bouts en V à l’arrière amarrés sur la grève, tant de précautions car le temps change si vite qu’on peut passer de 0 à 40 nds de vent en 5 minutes. Une lumineuse nuit étoilée nous fait profiter de la vision de la Croix du Sud, entre autres.

Le lendemain par un temps « patagon » (terme qui deviendra à bord emblématique d’un temps détestable !) , Venus se met en route dans un canal Nord-Ouest en passant devant plusieurs superbes glaciers bleus trempant leur langue dans une eau couleur amande, dont « La Romanche » d’où coule une somptueuse cascade.  Puis entrée dans le « Eastern arm » pour atteindre, après un parcours parsemé de gros glaçons a éviter soigneusement, le magnifique glacier Pia qui plonge dans une anse d’eau verte ou surnagent encore plus de glaçons.

Après avoir juste tourné autour car il est impossible de mouiller devant, nous allons nous amarrer dans la caleta Beaulieu, en face d’une branche du glacier « La Romanche ».

Un débarquement permet de grimper les pentes d’une colline trempée et gluante au dessus du mouillage de la caleta pour admirer des vues splendides sur le grand glacier et les bras de canaux alentour. Retour à bord bien crottés.

Il a même été possible de ramasser sur la grève un gros glaçon qui a agrémenté l’apéritif du soir.

La nuit venue, le voilier mouillé à nos côtés nous invite à aller passer une soirée de chants à son bord : ambiance garantie pour les participants !

Le lendemain, le vent se lève. Christophe n’a pas confiance en ce mouillage et décide de revenir à la caleta Olla, beaucoup plus abritée. On rejoint le Beagle en admirant à nouveau les glaciers encore plus bleus avec le soleil. Dans cette caleta très protégée, une famille de dauphins a accompagné longuement nos déplacements, dansant et sautant autour du bateau.

Mais le temps se couvre, il pleut fort. Il pleut toute la nuit et encore le lendemain avec un bon vent et assez froid. Impossible de débarquer pour faire la balade prévue le long du glacier.

Le retour s’effectue plutôt au moteur ou au génois avec alternance de soleil et de nuages tant le temps change rapidement. Au passage, nous dérangeons une importantes colonie de lions de mer grognant et plongeant pour protester contre cette intrusion.

Escale à la caleta Burracho. Après le même et méticuleux amarrage, promenade dans une forêt au sol spongieux, style primaire, envahie d’énormes arbres morts que, vu la difficulté de progression, nous n’avons pas explorée très avant.

Enfin après une navigation tantôt à la voile, tantôt au moteur sur un Beagle étale, admirant les montagnes dont les sommets ont reçu un poudrage de neige fraîche, et après avoir rencontré une 3° baleine, tellement proche qu’il faut ralentir le bateau, nous atteignons à nouveau Puerto Williams où il faut impérativement effectuer les (longues !) démarches administratives pour quitter le Chili, et dernière visite au Micalvi pour donner notre fanion à accrocher.

Enfin, le 18 février, après 12 jours de vie à bord, retour de Venus à Ushaia et débarquement vers la Préfecture se faire tamponner les passeports pour quitter l’Argentine. Douches bienvenues après 5 jours de mer !  Courses et promenade dans cette étrange ville.  Dernier repas et nuit dans ce qui a été notre lieu de vie très confortable et chaleureux et où nous avons beaucoup ri, chanté et dit des bêtises.

De cette belle aventure, il restera le souvenir d’une nature tellement sauvage et préservée, de paysages magnifiques, de ciels changeants où planent les oiseaux, de langues de glace bleue plongeant dans l’eau couleur d’amande ou flottent de gros glaçons, de silence, solitude et de conditions météo difficiles.  Certains voudront y retourner car finalement, ce fut bien court et la magie du continent glacé Antartique, pas si lointain, est bien tentante.

Clarisse

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2 Commentaires


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    • sur 22 mars 2015 à 14h09

    Il y a 2 types d’hommes : ceux qui ont passé le HORN… et les autres.

    Un grand merci pour ce palpitant reportage et ces magnifiques photos.


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    • sur 23 mars 2015 à 8h24

    Merci de nous avoir fait passer le Horn par procuration.

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